L'odeur des livres. J'avais toujours adoré l'odeur âcre et délicate qui régnait dans la boutique, un entremêlement de parchemins, d'encre et de cuir. Mon patron m'avait chargé de ranger les ouvrages traitant de divination dans leur étagère, je chantonnais légèrement tout en effectuant mon travail, savourant le calme de cette fin d'après-midi, néanmoins, je sentis qu'au fur et à mesure que les minutes passaient, que mes gestes se faisaient de plus en plus fébriles et impatients, dans une petite dizaine de minutes, je finissais mon service, et je retrouverais Nathaniel. Nate. Je l'avais connu dés mon enfance, sa famille étant amie avec la la mienne. Nate. J'avais grandi à ses côtés, tout vécu avec lui, tout. Mes premiers amours, mes premières déceptions, mes premières fois, tout. Il était né-moldu, mais ça, ça n'avait pas d'importante, le sang je m'en fichais éperdument, et ma famille aussi. Potter, nous étions une famille de sang mêlé, du sang moldu coulait dans nos veines et nous avions énormément de respect pour ces sorciers. Enfin, ma montre m'indiqua qu'il était dix-neuf heures, l'heure pour moi de partir, je pris le temps de saluer mes collègues avant de quitter la boutique.

Il faisait assez frais pour cette soirée de Février, je resserrai mon manteau contre moi en me dirigeant d'un pas décidé vers Londres, saluant ici et là mes quelques connaissances du chemin de Traverse. La ville était froide, partout, des rafleurs étaient postés, interrogeant ici et là quelques badauds. Je soupirais en continuant mon chemin. Depuis que Thaddeus Black avait été élu, la situation n'avait fait qu'empirer, partout, ces chiens de garde du ministère surveillaient, cherchant à trouver le moindre né-moldu qui se serait aventuré dans cette place soit-disant réservée aux "vrais" sorciers. Mon coeur s'accéléra tandis que je repensais à mon meilleur ami, j'avais peur, évidement que j'avais peur, lui qu'on accusait simplement de vivre, de ne pas être né dans une famille au sang que l'on considérait comme sorcier. Je secouai la tête, chassant les images terrifiantes qui me venaient à l'esprit. Peur, nous vivions tous dans la peur depuis que Black était à la tête du ministère. Peur pour mon ami, peur pour ma famille, fiers porteurs de l'étendard de l'Ordre du Phénix. Peur de ne plus les revoir, d'apprendre du jour au lendemain, une mort ou une arrestation, peur. Je sortis enfin du chemin de Traverse, atteignant Londres.

Je traversais les rues humides et froides, me dirigeant vers la petite maison de Nate, non loin de là. J'avais hâte de le retrouver, de le revoir, de savoir que ça allait bien. Enfin, j'arrivais à son quartier, avançant le long des maisons typiquement moldues. Un sourire se dessina sur mon visage alors que je repensais à ces soirées que nous avions passés ici et chez moi, à Godric's Hollow avec sa famille et la mienne. Mon père, Sirius ne cessait de poser mille et une questions sur les habitudes les plus étranges des moldus, que même lui, sang-mêlé, ne comprenait guère, tandis que ma mère, Ariane interogeait la sienne sur ces recettes de cuisine. C'était des moments de joie, simple et authentique, honnête et vraie. La joie d'être ensemble et de profiter de la vie loin de la haine et de la mort qui se répandaient au dehors. J'étais très proche de ma famille, mon père était un véritable modèle pour moi tandis que ma mère était ma meilleure confidente, mon oncle, mon tante et même ma famille plus éloignée, des cotés Digorry ou Potter, était pour moi sacrés, un clan, un pilier. Ils m'avaient offerts un héritage, bien plus important que l'argent et les bijoux de famille, des idéaux, une cause à défendre. Et ça, c'était à mes yeux, le plus important. J'arrivais enfin devant la maison de Nate, un sourire se dessina sur mes lèvres, alors que je frappais à la porte, prête à accueillir son sourire complice et ses blagues les plus stupides.

La porte s'ouvrir sur sa mère, l'air fatigué, ses yeux rouges et gonflés montraient qu'elle avait pleuré. « Ambre, bonsoir » « Bonsoir Calliope, comment ça va ? » « Tu n'as pas reçu de hibou express de ta mère ? » me demanda t-elle d'un ton surpris, la voix tremblante. « Non .. Je .. Pourquoi ? Ou est Nate ? » Une sensation étrange montaient en moi, un mauvais pressentiment. « Il .. Les rafleurs, ils l'ont eu, Ambre, je .. » Elle éclata en sanglots, je sentis mon cœur s'accélérer brutalement tandis que les larmes montaient, Nate, non. Impossible, pas lui. Aussitôt je transplanais, rejoignant directement mon jardin de Godric's Hollow, je rentrais en trombe dans la maison de mes parents, la respiration haletante. « Ambre ? » s'exclama mon père. Ma mère se précipita vers moi, m'enlaçant dans ses bras apaisants. Il était mort, comme ça, effacé de la vie comme d'un revers de la main, je ne le croyais pas, ne voulais pas le croire. Je ne saurais dire combien de temps je restais là, accroupie dans l'entrée dans les bras de ma mère, plusieurs heures, plusieurs minutes, je n'en savais rien. Je ne sentais rien, ni les caresses de ma mère dans mes cheveux, ni les perles salées qui coulaient le long de mon visage. Rien. Le lendemain, je passais la journée dans ma chambre, les yeux dans le vague, observant sans les voir les poutres de bois vernies. Le visage et la voix de mon ami se répercutaient dans mon esprit en un écho incessant. C'était injuste, terriblement injuste. Jamais il n'avait rien fait contre personne, il ne méritait pas ça. « Chérie, nous allons au QG de l'ordre, on reviens tout à l'heure. » L'ordre du Phoenix. Un combat, une armée, une voie. Depuis que j'étais petite, j'entendais parler de cet ordre crée par l'un des membres de ma famille, du coté de ma mère, l'illustre Arthur Diggory. Je n'y étais pas, mes parents jugeant que j'étais trop jeune, bien que je connaissais son existence et que j'étais destinée à y entrer prochainement. Le combat pour la liberté, c'était ainsi que je devais venger Nate, et non pas le pleurer comme faible. « Attendez. » « Chérie ? Qu'est ce qu'il y a ? » demanda ma mère. « Je veux en être. » « L'ordre ? » « Oui. » « Tu es sure ? Tu n'as pas encore vingt ans, je .. je ne suis pas sure, Ambre. » « Maman, je suis majeure, j'ai fini mes études. Ne t'inquiètes pas pour moi, je suis prête, je sais que je suis prête. » « Viens avec nous, on verras ce qu'en pense Arthur. » Une nouvelle voie qui s'ouvrait dans mon existence, une voie emplie d'embuches, de dangers, mais un nouveau combat pour mes idéaux. J'étais prête.